lundi 25 novembre 2013

Une part de ciel de Claudie Gallay





Une part de ciel

De Claudie Gallay
Roman
448 pages, 22€
Actes Sud, 21 août 2013

De retour pour quelques semaines dans sa vallée natale qui s’enfonce dans l’hiver, une femme redécouvre les non-dits du lien familial et la part d’absolu que chacun peut mettre en partage. Un roman de l’attente et des possibles, illuminé par la plume intense et intime de l’auteur des Déferlantes.







Début décembre, Carole retourne dans son village natal, le Val-des-seuls, un bourg isolé dans le massif de la Vanoise.
Elle y retrouve son frère Philippe, garde forestier et sa sœur, Gaby, qui attend le retour de son compagnon, pour l’instant en prison. Ils ont tous reçu le signe que leur père, Curtil, va revenir : une boule à neige ; un envoi qu’il fait à sa famille chaque fois qu’il est de retour après une longue absence.

J’ai reçu ce roman dans le cadre des matchs de la rentrée organisés par Pricemister, un roman de Claudie Gallay paru en août. Je précise sa date de sortie car, pour ma part, je pense que j’aurais davantage apprécié ma lecture si j’avais pu le lire au coin du feu, un soir de décembre.
Pourquoi ? L’auteure a un véritable génie pour rendre par son écriture l’atmosphère de son roman, ici un village enneigé en Savoie.
En lisant ce livre, j’avais l’impression de sentir le froid tomber sur mes épaules, d’entendre le bruit de mes pas étouffé par la neige fraîchement tombée, or, à l’heure où je vous écris cette chronique je n’ai pas encore vu le moindre flocon.

Je ne peux pas dire qu’il y ait vraiment d’intrigue, mais plutôt un fil conducteur : l’absence et l’attente qui en découle. L’attente au sens propre, celle du père, ses enfants ne savent pas quand il va arriver ni s’il va venir, mais aussi l’attente au sens figuré, les principaux protagonistes sont dans une certaine expectative ; Carole, la narratrice, la fille qui a fui la vallée pour la ville, est seule, une séparation et des enfants qui ont grandi et ont quitté le nid, est dans l’attente d’une nouvelle relation amoureuse ; Gaby, sa sœur, attend le retour de son conjoint et Philippe, leur frère, lui, attend de pouvoir réaliser son rêve : baliser le sentier emprunté par Hannibal.
Ce thème de l’attente est omniprésent dans le roman, ce village semble figé dans la neige, un village d’un autre temps, où le temps d’écoule lentement, loin des progrès de la ville, où l’idée de faire de leur hameau une station de ski se heurte à ses habitants peut enclin au profit au détriment de leur tranquillité, leur routine quotidienne.

C’est un point qui m’a fort étonnée dans ce livre, Claudie Gallay, s’attache à détailler chaque geste du quotidien, des gestes pourtant très banals ; pendant presque 450 pages, il ne se passe rien d’extraordinaire, pourtant l’auteure a réussi à me maintenir dans son roman.
Même si j’ai trouvé ce livre long et lent je n’ai pas pu m’empêcher de le lire jusqu’au bout. 
Je me suis sentie, au départ, comme une étrangère dans ce village, comme si je venais épier les habitants, pour finir je me suis complètement intégrée à ce hameau, me souciant de l’avenir du Val et de ses résidents.

Comment ai-je pu m’attacher à ce roman ? Grâce à ses protagonistes, des personnages qui ont tous leur intérêt, des personnages construits en profondeur.
Nous rencontrons la Baronne, propriétaire du chenil, nous côtoyons souvent Sam, le propriétaire du magasin du village, Francky et son bar (ou plutôt « le bar à Francky, je reviendrai sur le style d’écriture ensuite), Jean le patron de la scierie, la môme, une jeune fille que Gaby a recueillie, Marius, Yvon, Diégo et son puzzle, les bûcherons, etc.
Des personnages comme on peut en rencontrer dans tout village, des êtres un peu bourrus, d’autres sympathiques, les bons vivants, les solitaires, tous sont attachants, tous sont différents, leur seul point commun c’est l’attachement profond qu’ils ont pour leur montagne.
Chacun à leur manière contribue à rendre cette atmosphère propre à ce roman.
Une ambiance difficile à décrire, pas sombre, un peu morose, mystérieuse, glacée c’est le mot qui convient
Vous percevez les cimes enneigées, vous sentez le froid perpétuel, la brume hivernale qui laisse place à ce soleil des montagnes.

Je n’avais encore jamais lu de roman de l’auteure, je ne connaissais pas son style, un style d’écriture pas commun, une narration omniprésente, des phrases très courtes et incisives (Jean est arrivé. Jean a soupiré. Gaby les observait.) mélangées à des phrases plus complexes, mais avec toujours ces gestes du quotidien qui reviennent.
Carole, la narratrice, dont nous lisons le roman comme un journal intime, accomplit ses tâches journalières dans le même ordre, comme un rituel
C’est par moment déstabilisant, la lecture en est hachée, c’est fluide sans l’être vraiment. Les mots sont simples, mais choisi avec beaucoup de justesse pour narrer un regard, un geste, un sentiment.
Une autre chose qui m’a saisie c’est, comme j’en parlais plus haut, ces « fautes » de préposition (le bar à Francky, le zinc à Francky, le père à Francky).
Une écriture hachée qui m’a quelque peu agacée, on finit par s’y faire, mais je regrette que l’on reste parfois des pages entières sur des faits complètement anodins et qu’on survole les actes importants.

Le moins que l’on puisse dire c’est que Claudie Gallay est soucieuse du moindre détail, elle dissèque son roman à la loupe, autant dans les faits que dans les relations entre les différents protagonistes.

La fratrie,  en dehors de cette attente du père, cache des blessures profondes, des non-dits, des secrets de famille qui leur gâchent leur existence, l’absent ne les aurait-il pas réunis dans ce petit village perdu pour justement les rapprocher ?
Ne vous attendez pas à des retrouvailles chaleureuses, quand ces trois-là sont réunis au Val on perçoit la tension ; ils ne se détestent pas, mais ils ont difficile à montrer qu’ils s’aiment.
Au fil de la lecture, on observe les relations qui évoluent, et ce jusqu’à la fin du livre, on suit surtout Carole qui se bat contre les échecs de sa vie tout en essayant de se rapprocher de son frère et de sa sœur qu’elle ne comprend pas. Il y a aussi cet incendie qui a ravagé leur maison d’enfance et dont ils ne veulent pas discuter.

Un roman intimiste, plein de sentiments, de tendresse, des morceaux de vie, des personnages profondément humains et imparfaits, mais qui vont s’apporter beaucoup et pouvoir, peut-être, permettre de dévoiler « une part de ciel » dans leur quotidien morose… .


Un roman vraiment différent de ce que je lis, je n’en lirais pas tous les jours, mais une lecture, au final, très agréable et que, comme je l’ai déjà dit, je pense, j’aurais plus apprécié en plein hiver au coin du feu avec une tasse de thé et un plaid sur les genoux.


2 commentaires:

  1. Je n'ai personnellement pas aimé et c'est dommage...

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  2. Je suis en train de le lire, pour le moment, je suis assez mitigée :)

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Un petit commentaire fait toujours plaisir ♥ Merci 😊

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